Vivre hors du temps
La phénoménologie du temps

L’instant s’échappe à chaque fois que l’on essaie de l’attraper.
Est-il là, maintenant ? Non, il ne l’est déjà plus.
Ici ? Non plus. Il ne se trouve même pas à la fin de cette phrase.
Il s’agit là d’un étrange phénomène qui se dérobe en permanence à lui-même.
Le passé, quant à lui, n’a jamais existé, puisqu’il ne s’agit que d’un souvenir prenant place dans le présent.
Et il en va de même pour le futur. Ce n’est qu’une projection mentale qui a, elle aussi, lieu ici.
Il n’existe donc que cet instant. Un instant dont nous faisons constamment l’expérience, mais qui, paradoxalement, est toujours insaisissable.
Et, bien sûr, tout est en mouvement.
Cet instant n’est jamais le même, mais pourtant, il n’a jamais été autre chose que celui-ci.
Nous pouvons même dire qu’en réalité, nous ne faisons jamais l’expérience directe de ce mouvement, car si l’on s’en tient purement à notre vécu, il n’y a jamais eu que cet instant ; une image, sans avant ni après.
Le temps ne se montre jamais directement — c’est nous qui mettons ces instants en rapport les uns avec les autres et leur donnons ainsi une continuité.
Au fond, le présent n’est donc qu’un rien, qui se fait tout.
Alors, naturellement, il n’y a rien à faire pour y demeurer, puisque nous y sommes déjà.
Il n’y a qu’à cesser de vouloir atteindre quoi que ce soit, et reconnaître que nous n’avons jamais eu affaire qu’à lui.
Il n’y a qu’à s’y abandonner, et se laisser ainsi en faire l’expérience.
Il n’y a qu’à le regarder tel qu’il Est — là, dehors, comme à l’intérieur de nous.
Il n’y a qu’à se rendre à ce constat perceptif, sans en faire autre chose.
Un simple moment hors du temps...
Ne serait-ce pas cela, l’éternité ?