Le règne de l’intériorité

Le règne de l’intériorité

Le monde extérieur ne nous est jamais donné d’avance, mais qu’en est-il de soi ? Au fond, n’est-ce pas là la seule chose que nous possédons vraiment ? N’est-ce pas là ce qui nous a toujours appartenu ? Ce qui est déjà là, tel quel, avant tout le reste ?
Se tourner vers l’extérieur pour comprendre notre monde est bien évidemment naturel ; mais si c’est notre propre nature que l’on cherche à saisir, à quoi cela servirait ? Autant regarder directement en direction de ce que l’on cherche, en se tournant vers l’intérieur.
Et, bien sûr, c’est là une tâche fastidieuse, car contempler sa force est une chose, mais savoir faire de même pour sa faiblesse en est une autre. Pourtant, il n’existe pas d’autre possibilité.
Si l’on désire se connaître, il convient de maîtriser l’Art de se couvrir de son regard, car, en vérité, nul n’est plus proche de soi que celui qui parvient à s’embrasser lui-même, à faire sien chaque recoin, des plus ignobles aux plus gracieux.
Être apte à ne pas le détourner, voilà d’où provient l’idée de souveraineté ; voilà de quel genre de courage il faut s’armer pour gravir le sommet où nous nous attendons.
La pente est parfois raide, mais nous nous devons de nous y cramponner, car c’est là-haut, en ce centre de toute l’expérience, que s’épanouit la seule chose que nous possédons vraiment : l’indescriptible panorama qu’observe notre Être véritable.
C’est là, au cœur de cette universelle intimité, que se dresse notre conscience ; là où se trouve le véritable temple ; là où l’on se rend pour se prier soi-même ; là où s’est bâtie cette belle chapelle dans laquelle nous sommes invités à nous asseoir.
Parce qu’au final, pourquoi vit-on si ce n’est pour faire l’expérience de soi-même ?
Cette intériorité, je vous le dis, elle doit être sanctifiée. Elle doit régner sur notre vie. Elle doit être notre Inattaquable. Elle doit être la valeur à l’origine de toutes les autres. Elle doit constamment être première, simplement parce que c’est ici que tout se passe.
Le reste — l’extérieur — n’en est qu’un reflet. Un reflet qui ne se lassera jamais de nous ramener à nous-mêmes. Un reflet que nous tend sans relâche le miroir de notre propre profondeur, pour nous apprendre à la contempler sans fuir, et ce jusqu’à ce que nous en soyons sûrs : la contemplation de soi est la méthode la plus efficace, la plus directe et la plus précise pour flirter avec la grande connaissance. Celle-là même vers laquelle nous nous mouvons sans cesse, que l’on en ait conscience ou non.