La translucidité du réel

La translucidité du réel

La réalité a l’air de ce dont on a l’air pour elle — et nous, nous avons l’air de ce dont elle a l’air pour nous.
En d’autres mots, c’est nous-mêmes que nous cherchons à travers elle — et elle, c’est elle-même qu’elle cherche à travers nous.
Mais entre nous, il y a ce léger voile translucide, ce miroir que l’on cherche tant à apercevoir, pour finalement se rendre compte que l’on n’en a jamais eu besoin, puisque tout cela l’est déjà — translucide.
Et, évidemment, ceci est d’une extrême difficulté, car ce calque est d’une telle transparence qu’il faut un œil surentraîné pour se rendre compte qu’il n’a en fait jamais existé.
Tout ce qui a tendance à être d’une évidence indéniable et d’une absurde simplicité est justement ce qu’il y a de plus difficile à discerner — caché aux yeux de tous, parce que tellement là, à chaque instant, à la vue de tous.
Se regarder, dans son entièreté, c’est littéralement regarder le réel — et regarder le réel, dans son insupportable infinité, c’est littéralement se regarder.
En fin de compte, il n’y a justement plus rien à regarder.
Puisque si on le regarde, il nous regarde aussi, et alors nos yeux ne font que se répéter dans ceux de l’autre, pour l’éternité.
Si l’on veut vraiment le voir — et se voir —, il n’y a qu’à effondrer ce regard, pour laisser être ce qui a toujours été.